La mondialisation rend les mutations d’employés plus fréquentes entre le Canada et les États-Unis. Mobiliser des talents de chaque côté de la frontière peut s’avérer une stratégie payante pour les sociétés qui souhaitent optimiser leurs ressources humaines. Afin de comprendre les exigences juridiques des deux côtés de la frontière et limiter les complications liées à une mutation, il est nécessaire d’établir une planification fiscale et successorale avant le départ.

La résidence fiscale

Une des questions majeures est celle de la résidence fiscale. L’impôt sur le revenu canadien est lié à la résidence, tandis que les citoyens américains sont imposés sur leur revenus mondial quelque soit leur pays de résidence. Les résidents des États-Unis qui ne sont pas citoyens américains (les étrangers résidents) sont aussi imposés sur leur revenu mondial, comme s’ils étaient citoyens américains (alors que les étrangers non-résidents ne sont généralement imposés que sur leurs revenus américains).

Si les Canadiens qui sont mutés temporairement aux États-Unis passent avec succès le test de « présence substantielle », ils peuvent alors être considérés comme des étrangers résidents pour fins fiscales, ce qui, sans consulter un professionnel, peut malheureusement résulter en un impôt de départ canadien ainsi qu’en une double imposition sur certains revenus.

Le traité fiscal entre le Canada et les États-Unis permet de déterminer la résidence fiscale de ces employés qui pourraient être sujets à une double imposition. Cependant, l’application de ces règles peut démontrer que la résidence de l’employé est celle du pays dont les règles fiscales sont les moins avantageuses pour lui. Les facteurs utilisés dans le Traité pour déterminer la résidence fiscale sont : le lieu de résidence permanente, le centre de ses intérêts personnels et économiques, le domicile habituel et la citoyenneté. Une planification en amont peut ainsi permettre à l’employé d’éviter l’application de ces facteurs et de prendre des décisions de manière proactive pour maintenir sa résidence fiscale actuelle ou la changer pour une résidence fiscalement plus avantageuse.

L’impôt de départ

Les employés canadiens qui sont mutés aux États-Unis doivent être attentifs à l’impôt de départ canadien. Une fois considéré comme un non-résident du Canada, l’Agence du revenu du Canada (ARC) applique un impôt de départ sur la juste valeur marchande de certains biens, créant ainsi un gain en capital potentiel. Tous les avoirs ne sont pas sujets à cet impôt de départ (il en est ainsi des biens immobiliers situés au Canada, des REER et des FEER) mais certains avoirs tels que les actions et certains biens personnels y sont assujetis et sont susceptibles de représenter un fardeau fiscal important pour les personnes qui sont mutés aux États-Unis et qui ne sont plus résidents du Canada.

Les droits successoraux américains

L’IRS applique les droits successoraux américains sur les avoirs mondiaux des résidents américains. Par conséquent, le patrimoine mondial d’un employé canadien qui devient résident américain peut être sujet aux droits successoraux américains. Cette situation peut être évitée grâce à une planification successorale préalable. Il est important de garder en mémoire que les employés canadiens qui maintiennent leur résidence fiscale au Canada peuvent tout de même se voir appliquer des droits successoraux sur leurs biens situés aux États-Unis, même si ces derniers ont été acquis alors qu’ils se trouvaient à l’étranger, à condition que leur valeur patrimoniale mondiale soit supérieure à 5.34$ millions (le seuil d’exemption en vigueur en 2014) et que la valeur de leurs avoirs américains dépasse 60,000$.

Planification et solutions

Dans le cas d’une mutation temporaire aux États-Unis, il peut être judicieux pour un employé canadien de maintenir des liens avec le Canada pour éviter de se retrouver assujetti à un impôt de départ canadien et à des droits successoraux américains sur son patrimoine mondial.
Cependant, si le départ du Canada est correctement planifié, les employés pourraient profiter d’avantages fiscaux importants puisque les taux d’imposition sur le revenu américains sont inférieurs aux taux canadiens. De plus, une fois parti du Canada, ils disposeraient de la possibilité de retirer de leurs REER à un taux inférieur en tant que non-résident. Cela dit, chaque situation est différente, et la décision de maintenir ou de renoncer à sa résidence fiscale au Canada dépend des circonstances spécifiques de chacun.

Pour les employés mutés de manière permanente, la planification devrait idéalement démarrer 6 à 12 mois avant le départ afin d’optimiser les solutions fiscales, successorales et financières.

Afin que l’immigration pour des raisons d’affaires représente une opportunité de croissance à la fois pour l’employé et l’employeur et que la transition se fasse en douceur, il est important de planifier le départ en avance pour en éviter les écueils.